31 mai 2020

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Denis Gagnon: 20 ans dans la mode, 10 ans dans le Vieux

Denis Gagnon: 20 ans dans la mode, 10 ans dans le Vieux

Si pour certains la pandémie rime avec ralenti, une chose est sûre, ce n’est pas le cas dans l’atelier de Denis Gagnon qui a pignon sur rue dans le Vieux-Montréal. Les commandes de masques ont explosé ces dernières semaines, une production que le designer n’avait pas prévu mais qu’il prépare désormais avec le talent et l’engagement qui le caractérisent. C’est dans ce contexte qu’il célèbre deux anniversaires qu’on tenait à souligner : 20 ans de carrière dans la mode, 10 ans comme Gens du Vieux avec sa boutique rue St-Paul Ouest et un succès qui ne se dément pas. «J’arrive à chaque matin à partir 6 heures afin de faire réchauffer le fer et préparer la journée de travail de mon équipe. C’est difficile de se réinventer après toutes ces années, mais la passion est toujours là, donc je continue.» souligne Denis Gagnon.



Les masques ou l’art de se réinventer

« On a envoyé un masque à la mairesse Valérie Plante, confie Martin Blais, l’assistant de Denis Gagnon. Au niveau de la production, on suit un processus très rigoureux, la matière extérieure et synthétique et on utilise du triacétate pour certains modèles, donc ça nous permet de proposer du beau et du solide. Les masques sont ajustables, ça aussi c’est important car il faut que ce soit bien adapté au visage de chacun » insiste le jeune homme. Au départ, Denis Gagnon a cousu son propre masque, ne se voyant pas porter la griffe d’un autre, puis il en a fait pour ses employés, « puis il y a eu une demande croissante de la part de la clientèle, plus de 400 en 2 semaines! » indique M. Blais. « Pour nous, les masques sont une façon de nous réinventer, Denis travaille très fort! À presque 60 ans, il montre que c’est possible, de passer au travers et de continuer d’avancer» souligne celui qui l’accompagne depuis plus de deux ans et demi dans l’aventure de la marque.

Le poids de l’international, des débouchés essentiels

« On a une grosse clientèle internationale et pour ça, le Vieux-Montréal est l’endroit idéal, alors bien sûr, on s’inquiète dans la situation actuelle et des perspectives cette année. » constate M.Blais. Mais dans la Maison, pas le temps de s’inquiéter, la machine est bien rodée, portée par un ardent travailleur qui montre l’exemple. «Denis travaille très dur, martèle M.Blais. « Et depuis 20 ans, il n’a de cesse de diversifier ce qu’il fait. Il est très créatif et il a ainsi honoré des contrats pour le théâtre, l’orchestre symphonique, des artistes d’ici et d’ailleurs », énumère M.Blais. Il raconte en riant l’anecdote de l’actrice canadienne Evangeline Lilly, entrée dans la boutique pour chercher une tenue pour le tapis rouge d’Avengers. « On ne l’a pas reconnue tout de suite! s’exclame-t-il. Mais c’est une femme très charmante et très belle ».

Le succès du créateur ne l’étonne pas et selon M.Blais, il s’explique assez simplement. « On ne va pas solliciter les gens. On ne demande pas pour faire des collaborations, on laisse les gens venir à nous ». Il est certain que ce genre d’égéries apporte une belle visibilité pour ses tenues.

La démocratisation de la mode, une idée clé

Un autre facteur de la longévité du créateur québécois est sans aucun doute son extraordinaire capacité à démocratiser la mode sans lui faire perdre ses lettres de noblesse. Passer des podiums à la rue n’est pas une mince affaire mais Denis Gagnon a réussi des paris audacieux qui ont porté leurs fruits. Depuis 7 ans, le géant canadien du retail Simons vend ses créations et ses masques vont bientôt rejoindre la Fabrique 1840 qui est une section dédiée aux designers locaux. « On prépare d’ailleurs un modèle de masque exclusif pour eux » précise M.Blais.

La collection « Denise », un succès bien ancré

Et il y a eu aussi la collection unisexe Denise . «J’ai voulu faire la collection DENISE parce que j’avais envie de relever le défi de présenter une collection pour la vie de tous les jours. Une collection qui s’adresse à tout le monde, autant les femmes que les hommes.» nous explique le designer Denis Gagnon. Cette collection unisexe s’est révélée un véritable succès et les morceaux qui se vendent entre 55$ et 235$ ont tout pour plaire. « Nous les créons à partir de matières premières dont les grandes maisons ne veulent plus, explique M.Blais. Ce sont des tissus magnifiques, neufs et on leur donne ainsi une nouvelle vie ». Le défi que le designer s’était lancé a fonctionné et les hommes se sont montrés au rendez-vous : « Ça nous a permis d’élargir notre clientèle et notamment la clientèle masculine, qui représente actuellement 28% de nos acheteurs » précise ce dernier.

Le prix juste, un point d’honneur

Les pièces du designer se vendent dans un éventail de prix assez larges et quand on lui mentionne, Martin Blais explique que c’est une question de transparence. «Lorsqu’on va mettre un morceau en marché, Denis et moi nous nous asseyons et nous calculons les coûts réels de la production. Le prix ça n’est pas juste un nom sur l’étiquette, beaucoup de facteurs sont à prendre en considération et on veut que le prix reflète la matière, la complexité de la coupe ou au contraire son minimalisme». Et c’est là sans aucun doute un des secrets de Denis Gagnon pour traverser les saisons sans fausse note : un prix défini par la création plutôt par le créateur. M.Blais s’interrompt, le téléphone sonne, il s’excuse et doit nous quitter, Geneviève Borne, une fidèle de la marque, attend sur l’autre ligne.